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«Les kinés doivent prendre conscience de leurs compétences»

Sophie Conrard
Kiné actualité n° 1529 - 11/10/2018

L'INK organise le 27 octobre un congrès sur la place du kinésithérapeute dans la prise en charge pluridisciplinaire du patient obèse (voir p. 77). Zoom sur le "sport sur ordonnance" et le bilan APA avec Mathias Willame, qui a conçu le programme.



Kiné actualité : En quoi la création du “sport sur ordonnance” est-il une révolution dans le domaine de l’obésité ?

Mathias Willame : Ce serait une révolution si ça pouvait se mettre réellement en place. Le problème, c’est que malgré la loi du 31 mars 2017 et l’élaboration d’un bilan APA par les kinésithérapeutes, rien n’est prévu pour passer à l’étape pratique [1]. À part quelques initiatives isolées de très bonne qualité, on ne peut pas dire que le sport sur ordonnance se mette réellement en place. D’ailleurs, très peu de patients en ont entendu parler.

Le kinésithérapeute doit être au cœur de ce dispositif : avec un maillage de 85 000 professionnels libéraux sur tout le territoire, capables d’assurer le bilan APA, le suivi des patients, d’initier un projet d’APA avant de le confier à d’autres professionnels du sport, nous avons tous les atouts nécessaires ! L’investissement de notre profession et la mise en avant de notre expertise auprès de la HAS donneraient un coup d’accélérateur à ce projet.

Pourquoi la profession n’est-elle pas plus investie ?
Beaucoup de confrères ne se voient pas dans le rôle de “charnière centrale” du projet [2]. Il faut qu’ils prennent conscience de leurs compétences ! Ça doit commencer dès l’IFMK, or pour l’instant, on n’y parle pas beaucoup de ce type de prise en charge [3].

Je pensais que nous serions plus nombreux à nous approprier le sport sur ordonnance et à endosser ce rôle qui est très valorisant pour notre profession ! Nous pouvons être à la fois évaluateurs, régulateurs et prescripteurs dans un dispositif développant l’activité physique comme une stratégie thérapeutique non médicamenteuse. Nous devons apprendre à mieux prendre en charge les pathologies chroniques.

Le bilan APA sur lequel vous avez travaillé avec le CNOMK [4] peut-il être la clé de la réussite de ce projet ?
Oui ! Cet outil permet au kinésithérapeute d’évaluer les capacités fonctionnelles d’un patient, dans l’objectif de lui permettre de pratiquer l’activité physique de son choix. Où en est-il ? De quel accompagnement a-t-il besoin ? Dans quel cadre peut-il pratiquer ? etc. C’est aussi un outil de communication avec les médecins, les préparateurs physiques et enseignants en APA. Or cette communication est indispensable pour la réussite du projet.

Comment mettre en place le sport santé dans son cabinet ?
Un confrère qui s’intéresse au sujet trouvera sur le site de l’Ordre un descriptif des fondamentaux du bilan APA et les documents nécessaires s’il souhaite intégrer dans sa structure des préparateurs physiques ou des enseignants en APA.

Pour débuter, il faut avoir quelques notions sur la douleur chronique, les effets physiologiques du sport, sur les pathologies métaboliques de base et sur la gestion de ces séances hors nomenclature. Pour le bilan APA, notre outil principal est la palpation, l’évaluation du muscle – par exemple quand on regarde la qualité du quadriceps chez un patient souffrant de BPCO – et ça, on sait faire ! Un patient ne se déshabillera jamais devant un préparateur physique ou un enseignant en APA. C’est à nous d’assurer ce bilan, son suivi et de le mettre en confiance pour lui proposer un projet. Après, on l’oriente selon ses capacités et l’offre disponible aux alentours : association, club ou, si on en a les moyens et l’envie, on peut proposer des séances au cabinet. Tout est envisageable. Chacun s’organise comme il le veut/peut.

[1] La HAS doit publier le 17 octobre des recommandations sur le sujet.
[2] Lire Ka n°1528 p. 10 à 12.
[3] L’IFMK de Montpellier vient de lui confier un cours de 2h sur l’obésité.
[4] Plus d’infos sur www.ordremk.fr

© D.R.

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