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Gardons la main

Christophe Dauzac
Kinésithér Scient 2019,0606:01 - 10/02/2019

Faut-il avoir peur de l’ordinateur ?... Derrière cette question posée en 1950, lorsqu’il a été inventé, il faut entendre la crainte de la perte de l’homme, tout du moins en partie. C’est en fait ce qui s’est passé. L’homme a perdu subjectivement la mémoire. Depuis, il n’a de cesse de retrouver sa suprématie... Nous nous apercevons chaque jour que nous ne connaissons plus le numéro de téléphone autrefois si familier de la personne que l’on souhaite joindre.

Nous avons confié à une mémoire externe la charge de stocker ce qui n'est pas essentiel. Le visage et la personnalité du correspondant nous sont en revanche toujours familiers.

Notre mémoire est disponible pour des tâches supérieures. Contemplons sommairement l’évolution : les membres antérieurs ont perdu la fonction de portage, la main s’est révélée plus utile ; la bouche a perdu la fonction de préhension, le langage est né.

Vers une perte de fonction ?

Si l’Homme utilise de mieux en mieux l’environnement numérique, c’est qu’il a compris que pour surpasser ses fonctions, il avait tout intérêt à apprivoiser et développer cet outil devenu universel qu’est l’ordinateur. Il sert à tout, il est l’identifiant de tout le monde.

La révolution numérique n’est pas seulement culturelle ou cognitive, elle est pratique. Avant, on reconnaissait un métier d'un seul coup d'œil, par l’utilisation de son corps : le médecin et son stéthoscope, le menuisier et ses ciseaux à bois, le kinésithérapeute et sa table de travail... Aujourd'hui, par moment, ils se ressemblent tous, penchés sur leur ordinateur...

L’intelligence artificielle (IA) est-elle une contradiction ?

L’évolution humaine côtoie toujours le perfectionnement. L'intelligence artificielle mime de plus en plus le comportement des professionnels de santé et aide à la décision du praticien. Elle aidera un jour à anticiper le diagnostic de pathologies évolutives.

À l’heure où les exosquelettes sortent des laboratoires et pénètrent dans les entreprises, de nouvelles fonctions de l’individu et du professionnel de santé vont se développer. L’IA lui permettra d’avoir plus de recul pour une meilleure analyse des situations cliniques, par exemple.

Parce que nous avons perdu des fonctions nous avons gagné des outils qui multiplient nos possibilités. Nos manières de penser et d’apprendre sont bousculées mais la supervision humaine reste de mise. Restons les pieds sur terre et gardons la main !

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