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Avez-vous été confronté au syndrome de renutrition inapproprié (SRI) ?

Aude Quesnot
Kinésithér Scient 2021,0629:01 - 05/03/2021

La situation sanitaire liée à la Covid-19 nous a confronté depuis un an à prendre en charge des patients en kinésithérapie différents. Le nombre de patients sortant de soins intensifs ou de réanimation a augmenté dans nos structures de rééducation, tout comme le nombre de patients âgés pris en charge suite à une infection au coronavirus, ou tout simplement suite à une perte fonctionnelle secondaire à l’isolement social.

Ces patients ont subi un jeun prolongé partiel ou total, et sont dénutris. La renutrition doit se faire sous « haute surveillance » pour éviter l’apparition d’un SRI. Celui-ci survient lors de la renutrition d’un patient, quelle que soit la voie d’administration des apports nutritionnels (orale, entérale ou parentérale). La mortalité liée à une défaillance pluri-organique lors du SRI n’est pas négligeable : 36 % par voie parentérale, 21 % par voie entérale et 13 % par voie orale. D’où l’importance de notre sensibilisation.

On retrouve de nombreuses références historiques suggérant la survenue de SRI, notamment lors de la réintroduction d’une alimentation après une période prolongée de privation. C’est lors de la Seconde Guerre mondiale, après le siège de Leningrad, que furent rapportées des manifestations cliniques telles qu’une insuffisance cardiaque, une hypertension artérielle, des troubles respiratoires, neurologiques et musculaires évoquant le développement de complications liées à la réintroduction d’apports nutritionnels.

Tableau I
Critères NICE
(National Institute of Health and Clinical Excellence)

Que devons-nous savoir et transmettre à nos collègues ou à nos patients sur le SRI ?

• Savoir identifier les personnes à risque (tab. I). En théorie, tout patient dont les apports énergétiques sont négligeables depuis plus de 5 jours doit être considéré comme à risque de développer une complication lors de la renutrition.

• L’apport glucidique après une période de réduction prolongée entraîne une augmentation brutale de l’insulinémie, ce qui provoque le transfert intracellulaire d’électrolytes (phosphore, potassium, magnésium) dont les concentrations plasmatiques s’effondrent.

• L’hypophosphatémie constitue l’anomalie biologique la plus précoce et la plus fréquente de cette complication.

• Les atteintes principales du SRI sont cardiovasculaires, respiratoires, nerveuses et musculaires. L’évolution possible vers un syndrome de défaillance multiviscérale illustre la gravité de cette complication.

• Chez les sujets à risque, les apports énergétiques seront initialement réduits à 10 Kcal/kg/jour et l’augmentation des apports énergétiques sera progressive et adaptée à la tolérance. Une supplémentation vitaminique (B1) et en oligo-éléments sera systématique.

Pour limiter la dénutrition chez les patients à risque (patients âgés polypathologiques, maladies chroniques, patients institutionnalisés, patients en soins intensifs, etc.), privilégions la prévention, grâce à l’intervention précoce des kinésithérapeutes pour limiter la fonte musculaire et maintenir le niveau d’activité physique des patients, couplée à celle des diététiciens. En cas de troubles avérés de la déglutition ou de la mastication, le kinésithérapeute avec l’orthophoniste gardent une place prépondérante dans la prise en charge.

L’alimentation doit être une priorité chez les patients fragiles particulièrement.

Bon appétit à tous.

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