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Sébastien Guérard : "Pour constituer un groupe solide et fort, il faut que ses membres partagent une vision commune"

©LDS/REA - R. Gaillard

Sophie Conrard
- 8 avril 2022

Les Libéraux de santé (LDS), intersyndicale composée de 11 syndicats représentatifs de professionnels de santé libéraux, ont présenté le 30 mars un ambitieux projet de réforme de la santé, qui replace les soins de ville au cœur du système. Certains points de cette réforme ont été critiqués sur les réseaux sociaux. Mise au point avec Sébastien Guérard, président des LDS et de la FFMKR.



Kiné actualité : Quel est ce "projet de loi" que vous avez présenté le 30 mars au CESE ?

Sébastien Guérard : Notre projet de loi, même si nous avons eu plaisir à le partager avec les professionnels de santé présents à cet événement, s’adresse principalement aux institutionnels et aux candidats à l’élection présidentielle. Il ne s'agit pas d'exclure qui que ce soit de la réflexion, mais ce sont bien eux qui pourraient, un jour, le mettre en œuvre ou en reprendre des éléments dans un futur PLFSS ou une future loi de santé !

Pourquoi tous les syndicats n’ont-ils pas été invités à intégrer l'intersyndicale des Libéraux de Santé ? On vous le reproche parfois…

D'abord, nous ne voulions pas créer un doublon de l'Union nationale des professions de santé (UNPS), qui regroupe toutes les organisations syndicales représentatives. Mais surtout, l’interpro, ça se construit. Pour constituer un groupe solide et fort, il faut que ses membres partagent une vision commune. C'est le cas des membres fondateurs des LDS [1], qui se connaissent, se côtoient et travaillent ensemble depuis longtemps. Or pour ce qui concerne les masseurs-kinésithérapeutes, tout le monde sait qu'Alizé n'est pas toujours sur la même longueur d'ondes que la FFMKR.

Il faut aussi que les membres du groupe se respectent. En se plaignant sur les réseaux sociaux de n'avoir pas été invité, alors qu'il était inscrit et qu'il n'est pas venu, François Randazzo (président d'Alizé) nous a surpris. D'autant plus qu'on s’est croisé lors d'un autre événement le lendemain et qu’il s’est platement excusé de son absence de dernière minute "en raison d'un agenda surchargé". Par ailleurs, contrairement à ce que François Randazzo a pu dire sur les réseaux sociaux, Guillaume Rall, le président du SNMKR, a été invité et était présent lors de cet événement au CESE.

Revenons à votre "projet de loi". Pourquoi l'avez-vous élaboré ? Quel est votre objectif ?

L’objectif de cette "loi" (qui constitue plutôt une base de départ pour de futurs amendements à un PLFSS ou une future loi de santé) est d’émettre des propositions disruptives permettant de répondre à certaines de nos problématiques majeures, notamment un déséquilibre trop important entre le pouvoir des institutions et celui des organisations syndicales représentatives. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons participer à la gouvernance et au pilotage du système conventionnel.

Vous proposez notamment de faire bénéficier des acquis conventionnels les seuls adhérents des syndicats représentatifs. Comprenez-vous que certains l'aient mal pris ?

En effet, nous avons fait cette proposition, "à l’instar des accords conclus dans le champ du travail" (article 3 de notre texte). Tout le monde ne le sait peut-être pas, mais c'est déjà le cas avec les accords nationaux interprofessionnels ou les conventions de branches, qui dans un premier temps ne s’appliquent pas à tout le monde mais uniquement aux adhérents des syndicats signataires, jusqu’à parution de l’arrêté d’extension à l'ensemble de la population concernée (6 mois après la signature). Cela permet à un syndicat de protéger ses adhérents d’un accord dont il ne veut pas !

Par ailleurs, nous sommes conscients du faible poids des syndicats face à l'assurance maladie. Pour qu'ils soient plus forts, ils doivent rassembler plus d'adhérents. Ce serait un moyen d'y parvenir.

Permettez-moi de rappeler précisément ce que nous avons proposé : actuellement, lorsqu'un syndicat de masseurs-kinésithérapeutes signe un accord conventionnel, celui-ci n'est applicable que 6 mois après parution du décret. La proposition qui est faite consiste à faire bénéficier dès J0, à date de signature, des avantages négociés aux seuls adhérents de ce syndicat, en attendant le délai d'extension de 6 mois qui permet à tout le monde de bénéficier de l'accord. Ce petit avantage nous permettrait peut-être d'augmenter la représentation de nos organisations syndicales (à peine 10 % des masseurs-kinésithérapeutes sont syndiqués…) et serait, de notre point de vue, un juste retour envers nos cotisants, qui font vivre nos organisations et nous permettent d'œuvrer pour défendre la profession.

Vous invitez à revoir les critères de représentativité des syndicats, et notamment à supprimer les élections aux URPS. Pourquoi ? Souhaitez-vous également supprimer les URPS ?

Nous dénonçons plusieurs choses. D'abord, le fait que la représentativité nationale repose sur des élections régionales (avant la mise en place des URPS c'est le résultat aux élections de la Carpimko, élection nationale, qui déterminait la représentativité, nous regrettons que ce ne soit plus le cas).

Ensuite, si tout le monde a au moins une petite idée des enjeux des élections à la Carpimko, nous doutons qu'il en soit de même pour les élections aux URPS. Je serais d'ailleurs curieux de connaître le nombre de masseurs-kinésithérapeutes qui s’intéressent, de près ou de loin, aux missions des URPS !

Enfin, reprocher à la FFMKR un déni de démocratie, c'est mal connaître la structuration et le fonctionnement de cette fédération, qui repose sur 95 syndicats départementaux indépendants ! Chez nous, la voix de chaque adhérent compte, et toutes les décisions prises en conseil fédéral ou en congrès sont rendues publiques, jusqu'aux résultats des scrutins.

Pour en savoir plus

- Consulter le projet de réforme des Libéraux de Santé

- Découvrez le compte-rendu de la soirée du 30 mars dans le KA n°1608 du 21 avril

[1] Les Chirurgiens-dentistes de France (Les CDF), la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF), la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR), la Fédération nationale des infirmiers (FNI), la Fédération nationale des orthophonistes (FNO), la Fédération nationale des podologues (FNP), la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), le Syndicat des audioprothésistes (SDA), le Syndicat des biologistes (SDB), le Syndicat des médecins libéraux (SML) et le Syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO).

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