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Robotique, Homme numérique, intelligence artificielle et moi et moi et moi...

Aude Quesnot
Kinésithér Scient 2019,0609:01 - 05/05/2019

Ce mois-ci, Kinésithérapie Scientifique se tourne résolument vers les EBP et les techniques novatrices. Dans un premier temps, vous lirez avec un grand plaisir l’article de Jean-Michel Vitiello intitulé « Quels tests utiliser pour valider en sécurité un retrait des béquilles après une arthroplastie de genou ? ». Cet article permet, grâce à une étude ciblée, de déterminer de manière cartésienne et scientifique un acte banal réalisé chaque jour non pas de manière empirique, mais sur nos évaluations cliniques. Cette aide me paraît précieuse notamment dans le cadre des patients fragiles à risque de chute. Ce premier pas (sans béquille...) me permet de poursuivre sur la notion d’intelligence artificielle (IA) dans le domaine de la santé.

Depuis une dizaine d’années, la rééducation évolue dans le domaine de la robotique (Armeo®, Lokomat®, Andago®...). Nous avons substitué à des fonctions déficientes, de manière temporaire ou permanente, des exosquelettes entraînant les membres inférieurs ou supérieurs des patients à des fins fonctionnelles. Un relais a été exploité par l’industrie pour prévenir les lésions musculo-squelettiques des opérateurs. Des exosquelettes du membre supérieur dominant permettent à l’opérateur de percer en une nuit des milliers de trous au plafond de tunnels sans fatigue et avec moins de contraintes musculo-tendineuses.

Nous avons poursuivi notre évolution professionnelle en intégrant la santé connectée, la réalité virtuelle, la réalité augmentée pour le patient, pour le kinésithérapeute ou pour les étudiants. L’article « L’Homme numérique. Nouvelles technologies au service de la rééducation fonctionnelle : deux exemples concrets » rédigé par Pierre May-Carle et coll. explique ces différentes notions qui entrent maintenant dans le quotidien des étudiants et des patients les plus jeunes ou des geeks. Je me souviens de cette trilogie littéraire fantastique pour grands enfants ou adolescents datant des années 1995-2000 que vous connaissez peut-être « La croisée des mondes » de Philip Pullman dont a été tiré un film. Chaque enfant ou Homme était connecté à son daemon-animal. Un être augmenté à deux composantes...

Nous rentrons dans l’ère de l’Homme augmenté, « upgradé » ou de l'Homme 3.0 grâce, entre autres, à l’intelligence artificielle. Je ne m’attarderai pas sur la banalisation chez l’homme de l’utilisation de la pharmacopée contre les troubles de l’érection ou des techniques de rajeunissement chez la femme. Le concept de l’Homme augmenté est déjà présent et très prégnant.

Inséparables du Net, nous évoluons, nous nourrissons, nous utilisons en permanence cette intelligence connectée qui s’entrelace à l’intelligence individuelle et collective. Qui n’a pas été interloqué en recevant une notification de son smartphone sur le trafic à l’heure à laquelle on s’apprêtait à prendre son véhicule, en recevant des propositions de contacts sur Facebook ou sur les restaurants avec lesquels nous aurions une affinité de 87 % (et je n’ose aborder le sujet du marketing) ?

Via les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) à l’Ouest et les BATX (Baidu, Alibaba, Tincent, Xiamo) à l’Est, nous sommes les utilisateurs d’une IA capable d’auto-apprendre grâce notamment au « deep learning » (Yann Le Cun, Prix Turing - 27 mars 2019). Le cadre de l’évolution historique de l’IA est large et à appréhender. Dans tous les cas, nous nous dirigeons vers une intelligence hybride humaine et numérique.

Le transhumanisme peut paraître proche de l’intelligence artificielle avec ses idées d’augmentation des capacités physiques et mentales humaines, d’allongement considérable de la durée de vie sans vieillissement et d’immortalité.

Restons cependant pragmatiques.

Dans le domaine de la santé, les data et l’IA ont déjà une profonde influence sur nos pratiques. Les exemples qui suivent caractérisent ce phénomène :

– grâce à son smartphone, l’homme connaît parfaitement son activité physique, sa fréquence cardiaque, sa glycémie, la qualité de son sommeil, etc. ;

– l’auto-évaluation et le guidage à distance par un professionnel de santé via des applications de suivi de programme de santé ou de rééducation, en réalité augmentée ou virtuelle, vont devenir habituels ;

– l’imagerie diagnostique évolue vers une délégation à l’IA, plus fiable ;

– le choix d’une chimiothérapie sur telles souches de cellules cancéreuses ou le traitement des data sur la prévention primaire ou les traitements suivent la même évolution.

La kinésithérapie doit intégrer cette combinaison d’intelligence humaine et numérique et retrouver ses marques avec l’intégration de l’IA. Heureusement, avec notre toucher et nos mains, nous faisons partie des catégories de métiers non remplaçables par l'IA...

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