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Bronchiolite : stop au kiné-bashing !


- 9 novembre 2022

Alors que le ministre de la Santé, François Braun, a déclenché aujourd'hui le plan Orsan (organisation de la réponse du système de santé en situations sanitaires exceptionnelles) pour faire face à l'épidémie de bronchiolite, nous avons reçu ce courrier de la part d'un lecteur.



Se référant aux dernières recommandations de la HAS de novembre 2019, mais en les détournant de leur sens et de leur domaine de validité (elles portent sur le 1er épisode de bronchiolite chez l’enfant de moins de 12 mois), les messages les plus invraisemblables circulent, confondant allègrement non-recommandation et proscription. Si les antitussifs sont bien proscrits, la kinésithérapie respiratoire du nourrisson, bien que non recommandée par manque de preuve (comprendre : par manque de publications répondant aux critères de la HAS) est laissée à l’appréciation du prescripteur, y compris chez le nourrisson de moins de 1 an primo infecté !

Rien n’est dit en ce qui concerne les enfants présentant un second épisode de bronchiolite, rien n’est dit concernant les enfants de plus de 1 an, et les termes de la conférence de consensus de 2000 (ANAES) restent la seule référence valide, qui continue à bénéficier d’un niveau de preuve de grade C.

Nos pratiques quotidiennes de ville sont rarement assises sur des recommandations de haut niveau de preuve, car le cadre de la médecine ambulatoire ne l'autorise pas à mettre en place des études interventionnelles.

La kinésithérapie respiratoire de désencombrement, si elle ne peut s’appuyer sur des publications lui conférant un statut autre que celui de consensus, dispose néanmoins aujourd’hui d’hypothèses théoriques robustes issues des sciences fondamentales (mathématiques, physique) qui valident notre capacité à mobiliser le mucus des voies respiratoires, pour peu que certains critères, par ailleurs bien maîtrisés par la plupart des kinésithérapeutes à orientation pédiatrique et respiratoire, soient respectés.

En octobre 2021, Le Conseil d’État, saisi par une requête introduite par la FFMKR pour demander l’annulation de la recommandation de bonne pratique intitulée "Prise en charge du premier épisode de bronchiolite aiguë chez le nourrisson de moins de 12 mois" adoptée par la HAS le 6 novembre 2019, rejette cette requête mais reconnaît que la HAS a manqué de sincérité dans la procédure en cachant l’identité du président du groupe de travail, et reconnaît également que sa composition est déséquilibrée.

Il mentionne dans son jugement que ces recommandations sont bâties selon "un guide méthodologique qui n’instaure aucune règle et qui revêt seulement un caractère informatif sur la méthode suivie lors de l’élaboration de telles recommandations".

Que dit la HAS sur la kinésithérapie respiratoire ? "En l’absence de données, la kinésithérapie respiratoire de désencombrement bronchique n’est pas recommandée en ambulatoire. Il est nécessaire d’évaluer les techniques de modulation de flux en soins primaires par une étude randomisée et son impact sur le recours hospitalier."

La bronchiolite aigüe du nourrisson est une pathologie parfaitement connue, touchant chaque hiver environ 500 000 nourrissons entre 0 et 2 ans en France, qui évolue dans un contexte épidémique identifié depuis la fin des années 1980, et pour laquelle le recours hospitalier est exceptionnel. 98 % des enfants sont traités en ambulatoire !

Dès le début des années 2000, les kinésithérapeutes s’organisent en réseaux, sur tout le territoire national, afin d’assurer la continuité des soins durant la période épidémique, les week-ends et les jours fériés. Ces réseaux de soins, financés par des fonds publics, ont permis de coordonner les soins, d’assurer une homogénéité des pratiques à travers la formation continue, et d’éviter la saturation des services d’urgence, la mise en tension des services hospitaliers pédiatriques, ainsi que celle des services de réanimation, quelle que soit l’ampleur des épidémies successives depuis plus de 20 ans.

La HAS recommande paradoxalement, en 2019, de s’appuyer sur ces organisations pour répondre à l’épidémie.

Au total, il semble utile de ne pas se contenter de lire les gros titres réducteurs, il semble pertinent et responsable d’éviter d’ânonner et de véhiculer des messages inexacts de nature à faire perdre des chances aux nombreux nourrissons que nous soulageons, que nous surveillons, qui bénéficient de séances de kinésithérapie respiratoire efficientes, dont les jeunes parents constatent quotidiennement l’amélioration clinique franche de leur enfant.

 

Dominique Pelca

Kinésithérapeute libéral et coordinateur de la plateforme Kinés Muco

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